Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 1, Amyot, 1846.djvu/384

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rable : le peuple russe est musical ; on n’en peut douter quand on a entendu ses chants d’église. J’écoutais sans oser respirer et j’appelais de tous mes vœux notre savant ami Meyerbeer pour m’expliquer des beautés que je sentais profondément sans les comprendre ; il les aurait comprises en s’en inspirant, car sa manière d’admirer les modèles, c’est de les égaler.

Pendant ce Te Deum, au moment où deux chœurs se répondent, le tabernacle s’ouvre et l’on voit les prêtres coiffés de leurs tiares étincelantes de pierreries, vêtus de leurs robes d’or, sur lesquelles se détachent majestueusement leurs barbes d’argent : il y en a qui tombent jusqu’à la ceinture ; les assistants sont aussi brillants que les officiants. Cette cour est magnifique et le costume militaire y reluit de tout son éclat. Je voyais avec admiration le monde apporter à Dieu l’hommage de toutes ses pompes, de toutes ses richesses. La musique sacrée était écoutée, par un auditoire profane, avec un silence, un recueillement qui rendraient beaux des chants moins sublimes. Dieu est là, et sa présence sanctifie même la cour ; le monde n’est plus que l’accessoire, la pensée dominante est le ciel.

L’archevêque officiant ne déparait pas la majesté de cette scène. S’il n’est pas beau, il est vieux ; sa petite figure est celle d’une belette souffrante, mais sa