Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 1, Amyot, 1846.djvu/52

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(Suite de la lettre précédente.)
Le lendemain 6 juin au soir.

J’ai revu le grand-duc héritier, je l’ai examiné plus longtemps, et de fort près ; il avait quitté son uniforme, qui le serre et lui donne l’air gonflé ; l’habit ordinaire lui va mieux, ce me semble : il a une tournure agréable, une démarche noble sans aucune roideur militaire, et l’espèce de grâce qui le distingue rappelle le charme particulier attaché à la race slave. Ce n’est pas la vivacité de passion des pays chauds, ce n’est pas non plus la froideur impassible des hommes du Nord ; c’est un mélange de la simplicité, de la facilité méridionales et de la mélancolie scandinave. Les Slaves sont des Arabes blonds ; le grand-duc est plus qu’à moitié Allemand ; mais en Mecklembourg, ainsi que dans quelques parties du Holstein et de la Prusse, il y a des Allemands slaves.

Le visage de ce prince, malgré sa jeunesse, n’a pas autant d’agrément que sa taille ; son teint n’est plus frais[1] : on voit qu’il souffre, sa paupière s’abaisse sur le coin extérieur de l’œil avec une mélancolie qui tra-

  1. Le grand-duc héritier avait été malade quelque temps avant l’époque de son arrivée à Ems.