Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 1, Amyot, 1846.djvu/63

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Je vous décrirai avec exactitude tout ce que j’ai senti dans cette occasion ; mais laissez-moi d’abord vous y préparer comme j’y ai été préparé moi-même.

Je savais qu’il existe dans les archives de la légation française à Berlin des lettres et des notes diplomatiques d’un grand intérêt pour tout le monde, et surtout pour moi : elles sont de mon père.

En 1792, à vingt-deux ans qu’il avait alors, il fut choisi par les ministres de Louis XVI, roi constitutionnel depuis un an, pour remplir auprès du duc de Brunswick une mission importante et délicate. Il s’agissait de décider le duc à refuser le commandement de l’armée coalisée contre la France. On espérait avec raison que les crises de notre révolution deviendraient moins périlleuses pour le pays et pour le roi, si les étrangers ne s’efforçaient pas d’en contrarier violemment la marche.

Mon père arriva trop tard à Brunswick ; le duc avait donné sa parole. Cependant la confiance qu’inspiraient en France le caractère et l’habileté du jeune Custine était telle, qu’au lieu de le rappeler à Paris, on l’envoya encore tenter auprès de la cour de Prusse de nouveaux efforts pour détacher le roi Guillaume II de la même coalition, dont le duc de Brunswick avait déjà promis de commander les armées.

Peu de temps avant l’arrivée de mon père à Berlin,