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LETTRE DIX-HUITIÈME.


Pétersbourg, ce 30 juillet 1839.

Ce matin de bonne heure j’ai reçu la visite de la personne dont la conversation vous a été racontée dans ma lettre d’hier. Elle m’apportait quelques pages écrites en français par le jeune prince***, le fils de son protecteur. Cette relation d’un fait trop véritable est un des nombreux épisodes de l’événement assez récent dont toutes les âmes sensibles, tous les esprits sérieux sont ici préoccupés en secret. Peut-on jouir sans trouble du luxe d’une magnifique résidence, quand on pense qu’à quelques centaines de lieues du palais les sujets s’égorgent, et que la société se dissoudrait sans les terribles moyens employés pour la défendre ?

Le jeune prince*** qui vient d’écrire cette histoire serait à jamais perdu, si l’on pouvait se douter qu’il en fût l’auteur. Voilà pourquoi il me confie son manuscrit et me charge de le publier. Il consent à me laisser insérer l’anecdote de la mort de Telenef dans le texte de mon voyage, où je la donnerai pour ce qu’elle est, sans toutefois compromettre personne, mais je profite avec reconnaissance d’un moyen de jeter quelque variété dans ma narration. On me ga-