Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 3, Amyot, 1846.djvu/77

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tion : était-il essentiel aux destinées du genre humain que les marais de la Finlande fussent peuplés, et que des hommes réunis là pour leur malheur y bâtissent une ville merveilleuse à voir, mais qui au fond n’est qu’une singerie de l’Europe occidentale ? Le monde civilisé n’a gagné à l’agrandissement des Moscovites que la peur d’une invasion nouvelle et le modèle d’un despotisme sans miséricorde comme sans exemple, si ce n’est dans l’histoire ancienne. Encore, s’il était heureux, ce peuple !… mais il est la première victime de l’ambition dont se nourrit l’orgueil de ses maîtres.

La maison d’où je vous écris est d’une élégance qui contraste grossièrement avec la nudité des campagnes environnantes ; elle est à la fois poste et auberge, et je la trouve presque propre. On la prendrait pour l’habitation de campagne de quelque particulier aisé ; des stations de ce genre, quoique moins soignées que celle de Pomerania, sont bâties et entretenues de distance en distance, sur cette route, aux frais du gouvernement : les murs et les plafonds de celle-ci sont peints à l’italienne ; le rez-de-chaussée, composé de plusieurs salles spacieuses, ressemble assez à un restaurateur de province en France. Les meubles sont recouverts en cuir ; les siéges sont en canne et propres en apparence : partout on voit de grands canapés pouvant tenir lieu de lits,