Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 4, Amyot, 1846.djvu/176

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principe à part, ce même résultat a été obtenu de fait ici, par des moyens différents. Il a fallu, pour atteindre à ce but, que l’habileté des sujets suppléât à l’aveugle brusquerie de l’autorité, afin d’éviter les maux qui pouvaient résulter pour le pays des boutades du pouvoir suprême.

Il existe dans tout gouvernement à théories exagérées, une action cachée, un fait qui s’oppose presque toujours à ce que la doctrine, en elle-même, a d’insensé. Les Russes possèdent à un haut degré l’esprit du commerce ; tout ceci vous explique comment les marchands de la foire ont senti que les vrais négociants ne vivant que de confiance, tout sacrifice fait à leur crédit leur rapporte cent pour cent. Ce n’est pas tout : une autre influence encore aura refoulé la mauvaise foi et fait taire la cupidité aveugle. Les velléités de banqueroute auront été réprimées tout simplement par la peur, la véritable souveraine de la Russie. Cette fois les malintentionnés auront pensé que s’ils s’exposaient à quelques procès, ou seulement à des plaintes trop scandaleuses, les juges ou la police se tourneraient contre eux, et qu’en ce cas, ce qu’on appelle ici la loi serait appliqué à la rigueur. Ils ont redouté l’incarcération, les coups de roseau dans la prison ; que sais-je ? pis encore ! D’après tous ces motifs, qui fonctionnent doublement dans le silence universel, état normal de la