Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 4, Amyot, 1846.djvu/326

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recueillant mes souvenirs et en cherchant le repos dont j’ai besoin après le rapide voyage que je viens de terminer.

Quel contraste ! en Russie, j’étais privé du spectacle de la nature : il n’y a point là de nature ; pourtant ces vues de plaines, dénuées de paysages pittoresques, ont bien aussi leur genre de beauté : mais une grandeur sans charme fatigue vite : quel plaisir y a-t-il à voyager au travers d’immenses espaces nus, à perte de vue, où l’on ne découvre qu’une vaste étendue toute vide ? cette monotonie aggrave la fatigue du déplacement, parce qu’elle la rend infructueuse. La surprise entre pour quelque chose dans tous les plaisirs du voyage et dans le zèle du voyageur.

C’est avec bonheur que je me retrouve à la fin de la saison dans un pays varié et dont les beautés frappent d’abord les regards. Je ne saurais vous dire quel charme j’éprouvais il n’y a qu’un instant à m’égarer sous de grands bois dont une neige de feuilles mortes avait jonché le sol et couvert les sentiers effacés. Je me reportais aux descriptions de René ; le cœur me battait comme il avait battu jadis en lisant ce douloureux et sublime entretien d’une âme avec la nature.

Cette prose religieuse et lyrique n’avait rien perdu de son pouvoir sur moi, et je me disais, étonné