Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 4, Amyot, 1846.djvu/384

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non pas avec elle, puisqu’on l’immole impunément, mais avec des amis dont il faut continuer de faire des dupes, en ménageant leur ombrageuse philanthropie. On intéresse à ce ressentiment magnanime et passionné, notez ces deux points-ci, la sentinelle avancée du nouvel Empire romain qui s’appellera l’Empire grec, et le plus circonspect, mais le plus aveugle des rois de l’Europe[1], pour plaire à son voisin, qui est son maître, commence une guerre de religion… il n’est pas près de s’arrêter dans la route où on le pousse ; si l’on a pu égarer celui-là, on en séduira bien d’autres.

Considérez, je vous prie, que si jamais les Russes parvenaient à dominer l’Occident, ils ne le gouverneraient pas de chez eux, à la manière des anciens Mongols ; tout au contraire, ils n’auraient rien de si pressé que de sortir de leurs plaines glacées, et, sans imiter leurs anciens maîtres, les Tatars, qui pressuraient de loin les Slaves, leurs tributaires, — car le climat de la Moscovie effrayait même les Mongols, — les Moscovites sortiraient en foule de leur pays dès que les chemins des autres contrées leur seraient ouverts.

En ce moment, ils parlent modération, ils protestent contre la conquête de Constantinople, ils craigrent, disent-ils, tout ce qui peut agrandir un Empire.

  1. Écrit du vivant du feu roi de Prusse en 1839.