Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 4, Amyot, 1846.djvu/74

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Des domestiques apportent sur des plateaux de petites assiettes couvertes de caviar frais et tel qu’on n’en mange qu’en ce pays ; de poisson fumé, de fromage, de viande salée, de biscuits de mer et d’autres pâtisseries, sucrées et non sucrées ; on sert aussi des liqueurs amères, du vermout, de l’eau-de-vie de France, du porter de Londres, du vin de Hongrie et de l’or potable de Dantzik, et l’on mange et l’on boit tout cela debout en se promenant. Il ne tiendrait qu’à un étranger ignorant des usages du pays, et d’un appétit facile à contenter, de se rassasier ainsi tout d’abord, et de rester ensuite simple spectateur du véritable dîner, qui ne serait pour lui qu’un hors-d’œuvre. On mange beaucoup en Russie, et l’on fait bonne chère dans les bonnes maisons ; mais on aime trop les hachis, la farce et les boulettes de viande ou de poisson dans des pâtés à l’allemande, à l’italienne, ou dans des pâtés chauds à la française.

Un des poissons les plus délicats du monde (le sterléd) se pêche dans le Volga où il est abondant ; il tient du poisson de mer et du poisson d’eau douce, sans toutefois ressembler à aucun de ceux que j’ai mangés ailleurs : il est grand, sa chair est fine, légère, sa peau d’un goût exquis, et sa tête pointue, toute composée de cartilages, passe pour délicate : on assaisonne ce monstre d’une manière recherchée, mais sans trop d’épices : la sauce à laquelle on le sert a