Page:Cuvier - Recueil des éloges historiques vol 1.djvu/133

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

nes affectaient de blâmer, cachaient l'âme la plus humaine, les penchants les plus généreux. Ses libéralités étaient immenses, et, par une recherche délicate, sa femme, qu'une piété douce animait, en fut, tant qu'elle vécut, la seule dispensatrice. Il sentait que, même dans sa bienfaisance, son caractère l'aurait encore exposé a ne vouloir être que juste ; et parmi tant d'hommes que l'imprudence et quelquefois le vice ont conduits au malheur, combien n'en repousserait-on pas, si le cœur ne l'emportait sur la raison ?

Un magistrat de ses amis, qui occupait une place supérieure à la sienne, était mort peu de jours avant lui, et laissait une femme et des enfants sans fortune. L'Héritier, à peu près certain de lui succéder, avait promis de donner à cette veuve tout ce que sa promotion lui apporterait d'augmentation de revenu. Ainsi son meurtrier a privé d'un seul coup deux familles de leur soutien.

Il avait perdu son épouse, Thérèse-Valère Dore, en 1794, après dix-neuf ans d'une union heureuse. Elle lui laissa cinq enfants. Quoiqu'il fût encore dans la force de l'âge, son amour pour eux l'empêcha de se remarier. Il se proposait de surveiller par lui-même l'éducation de ceux qui étaient encore en bas âge, d'assurer le sort de tous en rétablissant sa fortune, et de mettre le sceau à sa gloire en terminant ses ouvrages. C'est ainsi qu'il voulait partager le reste de sa vie, entre ses devoirs de père, de citoyen et de savant. Sa vigueur et sa tempérance lui promettaient encore de longues années de bonheur, lorsqu'il fut arraché à toutes ces flat-