Page:Cuvier - Recueil des éloges historiques vol 1.djvu/238

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Les travaux les plus suivis, les conceptions les plus fécondes, n'ont été que trop souvent réduits à cette justice tardive ; et peut-être les exemples en seraient-ils décourageants à force d'être multipliés, si, à côté de cet injuste abandon, ils n'offraient aussi son préservatif et sa consolation ; je veux dire, si l'on n'y voyait en même temps et les causes qui le produisent et les jouissances qui en dédommagent.

Les unes et les autres viennent du même principe. L'homme digne de connaître la vérité, trop satisfait de ce charme ineffable attaché à sa recherche, ne s'occupe point assez de l'opinion des autres, et même, il faut le dire, c'est presque toujours sa propre indifférence qui cause celle de son siècle ; indifférence coupable, puisqu'elle peut faire manquer au génie sa noble destination.

L'éloge historique de M. Adanson mettra en évidence toutes ces vérités et tirera d'elles son principal intérêt. Les qualités diverses de cet homme savant et singulier, leur origine et leurs effets, leur accord et leur opposition leur influence sur ses travaux et sur sa fortune, concourront également à ce but.

Courage indomptable et patience infinie, génie profond et bizarrerie choquante, ardent désir d'une réputation prompte et mépris des moyens qui la donnent ; calme de l'âme, enfin, au milieu de tous les genres de privations et de souffrances ; tout, dans sa longue existence, méritera d'être médité, et deviendra tour à tour noble exemple pour l'émulation, ou salutaire avertissement pour la conduite.