Page:Cuvier - Recueil des éloges historiques vol 1.djvu/329

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mais l'admirable patience qu'un si jeune homme avait mise à la constater, toutes les précautions, toute la sagacité qu'il lui avait avait fallu, n'étaient guère moins merveilleuses : elles annonçaient un esprit dont on pouvait tout attendre, et l'Académie des sciences ne crut trop pouvoir se hâter d'inscrire ce jeune observateur parmi ses correspondants.

Bientôt après, un compatriote de Bonnet vint offrir un plus grand miracle aux savants étonnés : le polype, et sa reproduction indéfinie par la section, furent publiés par Abraham Trembley. Bonnet aussitôt appliqua le ciseau à tous les animaux communément appelés imparfaits : il vit les parties coupées renaître dans les vers de terre et d'eau douce ; il en multiplia aussi les individus en les divisant, quoiqu'il n'y ait nulle comparaison à faire entre leur organisation déjà si compliquée, et l'homogénéité presque complète du polype.

Ainsi commença à se montrer dans les animaux une force que l'on avait jusque-là regardée comme réservée aux plantes. C'est en suivant les vues de Bonnet, que Spallanzani porta jusqu'à leur dernier terme les preuves de cette force, quand il fit reproduire au limaçon sa tête avec sa langue, ses mâchoires et ses yeux ; et à la salamandre ses pattes avec tous leurs os, leurs muscles, leurs nerfs et leurs vaisseaux.

Cette propriété, mise en jeu dans les vers, présenta à Bonnet plusieurs phénomènes de détails faits pour étonner. L'extrémité antérieure fendue donnait deux têtes qui, à peine formées, devenaient ennemies