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Page:Cyrano de Bergerac - Œuvres, 1676, volume 1.djvu/141

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fera ſortir ſans raiſon ; mais cependant il parle autant que tous les Livres, & tous les Livres ſemblent n’avoir parlé que pour luy. Il n’ouvre jamais la bouche que nous n’y trouvions un larcin, & il eſt ſi accoûtumé à mettre au jour ſon pillage, que meſme quand il ne dit mot, c’eſt pour dérober cela aux muets. Nous ſommes pourtant de faux braves, & nous partageons avec injuſtice les avantages du combat, noſtre eſprit ayant trois facultez de l’oppoſer au ſien, qui n’en a qu’une ; c’eſt pourquoy s’il a dans la teſte beaucoup de vuide, on luy doit pardonner, puis qu’il n’a pas eſté poſſible à la Nature de la remplir avec le tiers d’une ame raiſonnable ; En récompenſe il ne la laiſſe pas dormir, il la tient ſans ceſſe occupée à dépoüiller quelqu’un ; Et ces grands Philoſophes, qui croyoient s’eſtre mis par la pauvreté qu’ils profeſſoient, à couvert d’impoſts & de contributions, luy doivent par jour chacun juſqu’au plus miſerable une rente de dix penſées, & ce Maltotier de conceptions, n’en laiſſe pas échapper un qu’il ne taxe aux aiſez, ſelon l’étenduë de ſon revenu ; Ils ont beau ſe cacher dans l’obſcurité, il les ſçait bien trouver, & les fait bien parler François : Encore ont-ils ſouvent le regret