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CONTRE UN GROS HOMME.

c’eſt à dire depuis le Taſſe juſqu’a Corneille, les Poetes ont accouché de voſtre enfant, ils ne pourroient rien inſerer, ſinon qu’une ame ordinaire n’eſtant pas allez grande pour vivifier voſtre maſſe de bout en bout, vous fûtes animé de celle du monde, & qu’aujourd’huy c’eſt ce qui eſt cauſe que vous imaginez par le cerveau de tous les hommes : Mais encore ils ſont bien éloignez d’avouer que vous imaginez, ils ſoûtiennent qu’il n’eſt pas poſſible que vous puiſſiez parler, ou que ſi vous parlez, c’eſt, comme jadis l’antre de la Sibille, qui parloit ſans le ſçavoir : mais encore que les fumées qui ſortent de voſtre bouche, je voulois dire de voſtre bondon, ſoient auſſi capables d’enyvrer que celles qui s’exhaloient de cette Grotte, je n’y vois rien d’auſſi prophétique ; c’eſt pourquoy j’eſtime que vous n’eſtes au plus que la Caverne des ſept Dormans, qui ronflent par voſtre bouche. Mais, bons Dieux ! qu’eſt-ce que je voy ? vous me ſemblez encore plus enflé qu’a l’ordinaire. Eſt-ce donc le courroux qui vous ſert de Seringue ? Déjà vos jambes & voſtre teſte ſe ſont tellement unies par leur extenſion à la circonférence de voſtre Globe, que vous n’eſtes plus qu’un Balon. Vous vous figurez peut-eſtre