Page:Cyrano de Bergerac - Œuvres, 1676, volume 1.djvu/29

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pouvoit-il adjoûter à tant d’honneur, ſinon de manger à noſtre table ? mais jugez ce qu’il demande quand il n’eſt jamais plus proche de nos Maiſons qu’à Midy : Plaignez-vous, Monſieur, aprés cela, qu’il deſſeiche l’humeur des rivieres ; helas ! ſans cette attraction, que ſerions nous devenus ? les fleuves, les lacs, les fontaines, ont ſuccé toute l’eau qui rendoit la terre feconde, & l’on ſe fâche qu’au hazard d’en faire gagner l’hydropiſie à la moyenne region, il prenne la charge de la repuiſer, & de promener par le Ciel les nuës, ces grands arrouſoirs dont il éteint la ſoif de nos Campagnes alterées, encore dans une ſaiſon où il eſt ſi fort épris de noſtre beauté qu’il nous veut voir tous nuds : J’ay bien de la peine à m’imaginer s’il n’attiroit à ſoy beaucoup d’eau pour y moüiller & rafraîchir ſes rayons, comment il nous baiſeroit ſans nous brûler ; mais quoy qu’on diſe, nous en avons toujours de reſte ; car au temps meſme que la Canicule par ſon ardeur, ne nous en laiſſe préciſement que pour la neceſſité, n’a-t’il pas ſoin de faire enrager les Chiens de peur qu’ils n’en boivent ? vous fulminez encore contre luy, ſur ce qu’il dérobe (dites-vous) juſqu’à nos ombres : il nous les oſte (je l’avouë) & il n’a garde de les laiſſer auprés de nous,