Page:Cyrano de Bergerac - L autre monde ou Les états et empires de la lune et du soleil, nouv éd, 1932.djvu/106

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j’aperçus devant moi un bel adolescent : « Je suis, me dit-il, l’Archange que tu cherches, je viens de lire dans Dieu qu’il t’avoit suggéré les moyens de venir ici, et qu’il vouloit que tu y attendisses sa volonté. » Il m’entretint de plusieurs choses et me dit entre autres : « Que cette lumière dont j’avois paru effrayé n’étoit rien de formidable ; quelle s’allumoit presque tous les soirs quand il faisoit la ronde, parce que, pour éviter les surprises des sorciers qui entrent partout sans être vus, il étoit contraint de jouer de l’espadon avec son épée flamboyante autour du Paradis Terrestre, et que cette lueur étoit les éclairs qu’engendroit son acier. — Ceux que vous apercevez de votre Monde, ajouta-t-il, sont produits par moi. Si quelquefois vous les remarquez bien loin c’est à cause que les nuages d’un climat éloigné se trouvant disposés à recevoir cette impression, font rejaillir jusques à vous ces légères images de feu, ainsi qu’une vapeur autrement située se trouve propre à former l’arc-en-ciel. Je ne vous instruirai pas davantage, aussi bien la Pomme de Science n’est pas loin d’ici ; aussitôt que vous en aurez mangé, vous serez docte comme moi. Mais surtout gardez-vous d’une méprise ; la plupart des fruits qui pendent à ce végétant sont environnés d’une écorce de laquelle si vous tâtez, vous descendrez au-dessous de l’Homme au lieu que le dedans vous fera monter aussi haut que l’Ange. »

Hélie en étoit là des instructions que lui avoit données le Séraphin quand un petit homme nous vint joindre. « C’est ici cet Énoc dont je vous ai parlé », me dit tout bas mon conducteur. Comme il achevoit ces mots Énoc nous présenta un panier plein de je ne sais quels fruits semblables aux Pommes de Grenade qu’il venoit de découvrir, ce jour-là même, en un bocage reculé. J’en serrai quelques-unes dans mes poches par le commandement d’Hélie, lorsqu’il lui demanda qui j’étois. — « C’est une