Page:Cyrano de Bergerac - L autre monde ou Les états et empires de la lune et du soleil, nouv éd, 1932.djvu/161

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nois[1] que les Espagnols ? Quant à cette ampoule et cette croûte dont vous ignorez la cause, il faut qu’elles arrivent, ou par la corruption des charognes de leurs ennemis que ces petits géans ont massacrés, ou que la peste produite par la nécessité des alimens dont les séditieux se sont gorgés, ait laissé pourrir dans la campagne des monceaux de cadavres, ou que ce tyran après avoir tout autour de soi chassé ses compagnons qui de leurs corps bouchoient les pores du nôtre, ait donné passage à la pituite, laquelle étant extravasée hors la sphère de la circulation de notre sang, s’est corrompue. On me demandera peut-être pourquoi un ciron en produit tant d’autres ? Ce n’est pas chose malaisée à concevoir ; car de même qu’une révolte en produit une autre, ainsi ces petits peuples poussés du mauvais exemple de leurs compagnons séditieux, aspirent chacun au commandement, allumant partout la guerre, le massacre et la faim. Mais me direz-vous, certaines personnes sont bien moins sujettes à la démangeaison que d’autres. Cependant chacun est rempli également de ces petits animaux, puisque ce sont eux, dites-vous, qui font la vie. Il est vrai ; aussi remarquons-nous que les flegmatiques sont moins en proie à la gratelle que les bilieux, à cause que le peuple sympathisant au climat qu’il habite est plus lent en un corps froid, qu’un autre échauffé par la température de sa région, qui pétille, se remue, et ne sauroit demeurer en une place. Ainsi le bilieux est bien plus délicat que le flegmatique parce qu’étant animé en bien plus de parties, et l’âme étant l’action de ces petites bêtes, il est capable de sentir en tous les endroits où ce bétail se remue ; là où le phlegmatique n’étant pas assez chaud pour faire agir qu’en peu d’endroits cette remuante populace, il n’est sensible

  1. Irlandais