Page:Cyrano de Bergerac - L autre monde ou Les états et empires de la lune et du soleil, nouv éd, 1932.djvu/286

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infini d’éclats qui retentissoient jusqu’aux nues, je distinguai plusieurs fois ce mot de Grâce ! grâce ! grâce !

Ensuite, deux Tourterelles s’approchèrent de moi. À leur venue, tous les funestes appareils de ma mort se dissipèrent ; je sentis mes Hérons relâcher les cercles de ces longs cous qui m’entortilloient, et mon corps étendu en sautoir, griller (209)) du faîte des quatre arbres jusqu’aux pieds de leurs racines.

Je n’attendois de ma chute que de briser à terre contre quelque rocher ; mais au bout de ma peur je fus bien étonné de me trouver à mon séant sur une Autruche blanche, qui se mit au galop dès qu’elle me sentit sur son dos.

On me fit faire un autre chemin que celui par où j’étois venu, car il me souvient que je traversai un grand bois de myrtes, et un autre de térébinthes, aboutissant à une vaste forêt d’oliviers où m’attendoit le Roi Colombe au milieu de toute sa cour.

Sitôt qu’il m’aperçut il fit signe qu’on m’aidât à descendre. Aussitôt deux Aigles de la Garde me tendirent les pattes, et me portèrent à leur Prince.

Je voulus par respect embrasser et baiser les petits ergots de Sa Majesté, mais elle se retira. « Et je vous demande, dit-elle auparavant, si vous connoissez cet Oiseau ? »

À ces paroles, on me montra un perroquet qui se mit à rouer (210) et à battre des ailes, comme il aperçut que je le considérois : « Et il me semble, criai-je au Roi, que je l’ai vu quelque part ; mais la peur et la joie ont chez moi tellement brouillé les espèces, que je ne puis encore marquer bien clairement où ç’a été. »

Le Perroquet à ces mots me vint de ses deux ailes accoler le visage, et me dit : « Quoi ! vous ne connoissez plus César, le Perroquet de votre cousine, à l’occasion