Page:Déjacque - L’Humanisphère, utopie anarchique.djvu/35

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bambin, blessure du jeune âge dont il portera longtemps la cicatrice !…

L’homme, — quel orgueil à la fois et quelle puérilité ! — l’homme a donc proclamé un Dieu, créateur de toutes choses, un Dieu imbécile et féroce, un Dieu à son image. C’est-à-dire qu’il s’est fait le créateur de Dieu. Il a pondu l’œuf, il l’a couvé et il s’est mis en adoration devant son poussin, — j’allais dire devant son excrément, — car il fallait que l’homme eût de bien violentes coliques de cerveau le jour où il a fait ses nécessités… d’une pareille sottise. Le poussin eut tout naturellement pour poulailler des temples, des églises. Aujourd’hui ce poussin est un vieux coq aux trois quarts déplumé, sans crête et sans ergots, une vieille carcasse tellement rabougrie que c’est à peine si cela mérite qu’on lui torde le cou pour la mettre dans la chaudière. La science lui a enlevé une à une toutes ses terribles attributions. Et les saltimbanques en soutanes, qui le promènent encore sur les champs de foire du monde, n’ont plus guère du Dieu tout puissant que l’image étalée sur les toiles de leur baraque. Et pourtant cette image est encore un loup-garou pour la masse de l’humanité. Ah ! si, au lieu de s’agenouiller devant elle, les fidèles de la divinité osaient la regarder en face, ils verraient bien que ce n’est pas un personnage réel, mais une mauvaise peinture, un peu de