nité. Nous sommes en l’an 2858. — Imaginez un sauvage des premiers âges, arraché du sein de sa forêt primitive et jeté sans transition à quarante siècles de distance au milieu de l’Europe actuelle, en France, à Paris. Supposez qu’une puissance magique ait délié son intelligence et la promène à travers les merveilles de l’industrie, de l’agriculture, de l’architecture, de tous les arts et de toutes les sciences, et que, comme un cicerone, elle lui en montre et lui en explique toutes les beautés. Et maintenant jugez de l’étonnement de ce sauvage. Il tombera en admiration devant toutes ces choses ; il ne pourra en croire ses yeux ni ses oreilles ; il criera au miracle, à la civilisation, à l’utopie !
Imaginez maintenant un civilisé transplanté tout à coup du Paris du 19e siècle au temps originaire de l’humanité. Et jugez de sa stupéfaction en face de ces hommes qui n’ont encore d’autres instincts que ceux de la brute, des hommes qui paissent et qui bêlent, qui beuglent et qui ruminent, qui ruent et qui braient, qui mordent, qui griffent et qui rugissent, des hommes pour qui les doigts, la langue, l’intelligence sont des outils dont ils ne connaissent pas le maniement, un mécanisme dont ils sont hors d’état de comprendre les rouages. Figurez-vous ce civilisé, ainsi exposé à la merci des hommes farouches, à la fureur des bêtes féro-