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Page:Déjacques - De l’être humain mâle et femelle - Lettre à P. J. Proudhon, 2012.djvu/7

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de son coeur et de son intelligence, celle-là fut impitoyablement lapidée par la multitude des Proudhons passés et présents, poursuivie du nom de bas-bleu ou de quelqu’autre imbécile sarcasme, et forcée à se replier sur elle-même. Pour cette foule d’hommes sans coeur et sans intelligence, elle avait péché par trop de coeur et trop d’intelligence : on lui jeta la pierre ; et bien rarement il lui fut donné de rencontrer l’homme-type qui, la prenant par la main, lui dit : femme relevez-vous, vous êtes dignes [sic] d’amour et digne de la Liberté.

Non, ce qu’il faut à l’homme, c’est-à-dire à celui qui usurpe ce nom, ce n’est pas la femme dans toute sa beauté physique et morale, la femme aux formes élégantes et artistiques, au front auréolisé de grâce et d’amour, au coeur actif et tendre, à la pensée enthousiaste, à l’âme éprise d’un poétique et humanitaire idéal ; non, à ce niais badaud courreur de foires, ce qu’il faut c’est une figure de cire enluminée et empanachée ; à ce gastronome de bestialité, en extase devant les étals de boucheries, ce qu’il faut, vous dis-je, c’est un quartier de veau orné de guipures ! Si bien que, rassasiée de l’homme qu’elle trouvait si crétin, blasée de celui en qui elle cherchait en vain l’organe du sentiment, la femme – c’est l’histoire qui le dit, je veux croire que c’est une fable, un conte, une bible – la femme – oh ! voilez-vous, chastes yeux et chastes pensées – la femme aurait passé du bipède au quadrupède... Ane pour âne, il était naturel, après tout, qu’elle se laissât séduire par la bête de plus gros calibre. Puis enfin, comme la nature l’avait douée de facultés morales trop robustes pour être anéanties par le jeûne, elle s’est détournée de l’Humanité et est allée chercher dans les temples de la superstition, dans les religieuses aberrations de l’esprit et du coeur, l’aliment aux aspirations passionnelles de son âme. A défaut de l’homme rêvé par elle, elle a donné ses sentiments d’amour à un dieu imaginaire, et, pour les sensations, le prêtre a remplacé l’âne !

Ah ! s’il est de par le monde tant d’abjectes créatures femelles et si peu de femmes, hommes, à qui faut-il s’en prendre? Dandin-Proudhon, de quoi vous plaignez-vous? Vous l’avez voulu...

Et cependant vous avez, vous, personnellement, je le reconnais, fourni de formidables coups de boutoir au service de la Révolution. Vous avez entaillé