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HARANGUE DE DÉMOSTHÈNE SUR LA COURONNE.

politiques, pour repousser d’abord des outrages personnels : non, je ne le ferai point, je ne suis pas insensé. Je vais examiner, avant tout, les calomnies dont vous noircissez mon administration ; et, quant à ce torrent d’injures que vous m’avez prodiguées sans pudeur, je m’en occuperai dans un autre tems, si l’on veut bien m’entendre.

L’accusation présente est grave, et par le nombre et par la qualité des délits qu’elle renferme ; elle offre même de ces crimes que la loi punit des derniers châtimens : mais l’accusateur n’a d’autre motif, dans le procès qu’il intente, que d’insulter un ennemi, de l’outrager, de le diffamer, de l’accabler, d’assouvir, enfin, un cruel ressentiment. Si j’étais coupable de tout ce qu’il m’impute, la république, non, la république ne pourrait assez le punir lui-même. Je sais que la tribune ne doit être fermée à aucun des citoyens qui veulent parler au peuple ; mais aussi, j’en atteste les dieux, il est contraire aux lois de la justice et d’une sage démocratie, de n’y paraître que pour contenter sa haine et sa malignité. Ce qui serait juste et régulier, ce serait qu’Eschine, quand il me voyait causer à la république d’aussi grands dommages qu’il l’annonçait tantôt avec son ton de déclamateur, m’eût attaqué et poursuivi légalement dans le tems même où je commettais les délits ; qu’il m’eût dénoncé comme infracteur des lois, si j’enfreignais les lois ; déféré aux juges comme traître à l’état