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HARANGUE DE DÉMOSTHÈNE SUR LA COURONNE.

l’ordre qu’ils en avaient reçu. Il faut vous apprendre, Athéniens, combien il importait d’user de diligence. Philippe, pour son avantage, devait différer les sermens ; et vous, pour le vôtre, vous auriez dû les hâter. Pourquoi ? c’est que vous, vous interrompîtes tous les préparatifs de guerre, je ne dis pas du jour où vous aviez juré la paix, mais du jour même où vous l’aviez espérée. Philippe, au contraire, ne fut jamais plus actif. Il pensait, et il pensait juste, qu’on ne lui disputerait pas ce qu’il aurait pris avant la conclusion du traité, et qu’assurément on ne voudrait pas le rompre pour quelques places. Prévoyant donc ses intentions, et songeant à le prévenir, je portai un décret qui ordonnait aux députés de le joindre au plus tôt, pour recevoir son serment. Par-là, Athéniens, la paix aurait été conclue, sans que les Thraces, vos alliés, eussent perdu les places dont Eschine se raillait tout à l’heure, Serrie, Myrtium, Ergisque ; sans que Philippe se fût rendu maître de la Thrace, en s’emparant des postes qui pouvaient l’y conduire ; sans qu’il eût acquis des facilités pour conquérir le reste, en tirant, de ses premières conquêtes, beaucoup d’argent et de soldats. Et mon adversaire, qui ne dit pas un mot de ce décret, qui n’a garde de le produire, me fait un crime de ce qu’en qualité de sénateur, j’ai admis à votre audience les députés du prince[1]. Mais que devais-je faire, Athéniens ? Devais-je écarter de votre

  1. Démosthène répond ici, en passant, aux reproches que lui fait Eschine sur les basses complaisances qu’il prétend qu’il a eues pour les députés de Philippe, en les introduisant dans l’assemblée et au spectacle. On peut voir ces reproches p. 84 et 87. — Pour deux oboles. On donnait deux oboles pour avoir une place au spectacle ; ces deux oboles servaient probablement aux réparations des sièges. L’obole valait vingt deniers de notre monnaie.