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Page:Démosthène - Œuvres complètes, Auger, 1820, tome 5.djvu/370

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HARANGUE DE DÉMOSTHÈNE SUR LA COURONNE.

accusé de crimes d’état, devant d’autres encore, vous me laissiez tranquille : et, lorsque tout conspire à me déclarer innocent, lois, tems écoulé, jour préfix, jugemens antérieurs toujours à mon avantage, administration reconnue irréprochable, services rendus à la patrie, qui lui ont acquis plus ou moins de gloire, selon les conjonctures dont un ministre ne peut répondre ; c’est alors que vous m’attaquez. Prenez garde d’être en effet l’ennemi de la république, quand vous prétendez être le mien.

Après avoir exposé à mes juges toutes les raisons capables de décider leurs suffrages, comme la justice semble exiger que, malgré mon éloignement pour l’invective, je rende à mon accusateur quelques vérités absolument nécessaires pour toutes les injures calomnieuses qu’il a vomies contre moi, il faut faire connaître le caractère et l’origine de cet homme, si prompt à médire, si hardi à relever mes expressions, lui qui s’en est permis, dont rougirait tout homme un peu raisonnable. En effet, si j’avais pour accusateur un Éacus, un Rhadamanthe, un Minos [47], et non pas un artisan de mots, un suppôt de chicane, un clerc de greffe, je ne crois pas qu’ils eussent jamais emprunté un langage aussi extraordinaire, qu’ils se fussent écriés d’un ton aussi tragique : ô terre, ô soleil, ô vertu [48], invoquant les lumières acquises et naturelles qui nous font discerner le bien et le