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HARANGUE DE DÉMOSTHÈNE SUR LA COURONNE.

jamais des iniquités que vous commîtes alors. J’invoque, devant vous, Athéniens, les dieux et les déesses tutélaires de l’Attique, Apollon Pythien révéré par Athènes comme un de ses ancêtres ; et si je vous dis aujourd’hui la vérité, si je vous l’ai dite alors, dès que je vis ce scélérat ourdir son intrigue (et je ne tardai pas, non je ne tardai pas à m’en apercevoir), je les supplie tous de m’accorder le salut et le bonheur ; mais, si la haine ou la rivalité me porte à l’accuser faussement, puissent ces mêmes dieux me priver de tout avantage ! Pourquoi donc toutes ces précautions sur moi-même, et ce ton de véhémence ? c’est, Athéniens, que, malgré le témoignage des registres publics, et la vérité des faits encore présens à votre mémoire, je crains que vous ne jugiez Eschine incapable de si grands crimes ; comme il arriva, lorsque, séduits par ses faux rapports, vous laissâtes ruiner de fond en comble la malheureuse Phocide. Cette guerre d’Amphisse, qui a ouvert à Philippe les portes d’Élatée, et qui l’a mis à la tête des Grecs amphictyoniques, événement d’où est enfin résultée la ruine de la Grèce, c’est lui qui l’a suscitée, lui, l’unique auteur de tous nos maux. Je ne manquai pourtant pas alors d’élever la voix, et de m’écrier en pleine assemblée : Eschine. vous portez la guerre dans l’Attique, la guerre des amphictyons. Mais ses audacieux partisans me fermaient la bouche ; les autres, dans leur surprise,