peuple rempli d’estime pour le mérite ; incapable
de lui envier ses récompenses. De plus, vous comblâtes
toujours de distinctions les vainqueurs dans
les combats gymniques [57] ; et, parce qu’il est très-peu
d’hommes qui peuvent obtenir ces distinctions,
vous n’y portez pas envie, vous n’en retranchez
rien. Notre ville, en un mot, ne se laissa jamais
surpasser en bienfaits ; et les témoignages de sa
reconnaissance furent toujours au-dessus des services :
ce qui annonce de l’équité, de la vertu, de
la générosité. N’enlevez donc pas aujourd’hui à
notre ville une gloire qui l’a distinguée dans tous
les siècles ; et pour vous prêter au ressentiment de
Leptine, qui voudrait dépouiller d’une faveur quel-ques
ennemis particuliers, n’allez pas vous ôter à
vous-mêmes la réputation d’honneur dont vous
avez joui dans tous les tems. Croyez qu’il ne s’agit
pas moins ici que de la dignité d’Athènes ; que
vous allez décider si cette dignité subsistera et sera
conservée pure, ou si nous la verrons altérée et entièrement
perdue.
Plusieurs choses me surprennent dans la loi de Leptine ; mais il en est une sur tout qui m’étonne. A-t-il ignoré que, si celui qui établit des peines sévères contre les crimes, parait lui-même éloigné d’en commettre, celui-là aussi, qui veut abolir les récompenses des services, se montre lui-même peu disposé à servir sa patrie ? S’il l’a ignoré, comme cela pourrait être, il le fera voir bientôt, en vous