bien plus révoltant que de les abattre. Oui, nos
grâces seront révoquées, et les colonnes resteront
pour confirmer les reproches des ennemis de notre
ville. Mais si le prince nous fait demander de quoi
nous nous plaignons, ce que nous avons à lui reprocher
pour lui ôter son privilège ; que dirons-nous, je vous prie ? Que dira le citoyen qui portera
un décret pour nous justifier ? Dira-t-il qu’il
lui ôte son privilège, parce qu’il est des hommes
qui en sont indignes ? Mais si le prince réplique,
Il est, sans doute, aussi des méchans parmi les
Athéniens : mais comme, à cause d’eux, je ne
veux pas frustrer les bons, je les laisse jouir tous
indistinctement, parce qu’en général je n’ai pas à
me plaindre du peuple ; ne serait-ce point là parler
plus raisonnablement que nous ? oui, à ce qu’il
me semble ; puisqu’il est plus ordinaire parmi les
hommes de faire du bien, à cause de ceux qui nous
en font, même à des gens qui ne le méritent pas,
que de priver d’une faveur tous ceux qui en sont
dignes sans contredit, à cause de quelques-uns qui
en sont indignes. Je ne saurais non plus m’imaginer
que celui d’entre nous qui le voudra, ne force
pas Leucon de subir un échange [l0]. Ce prince a
des fonds dans l’Attique ; et si, en conséquence de
la loi, quelqu’un les envahit, il faudra qu’il les