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Renard a nommés depuis « nos frères farouches », et les a-t-il accueillis largement dans son œuvre, ou, au contraire, a-t-il limité son intérêt pour eux à son fameux culte des chats, « orgueil de la maison », amis

Des amoureux fervents et des savants austères ;

en un mot ce poète, l’ami des peintres et parfois leur émule, ce poète fut-il ce qu’on appelle dans la langue plastique, un « animalier », c’est la question que son œuvre nous suggère aujourd’hui et que nous nous plairons à isoler ici.

Presque au seuil des Fleurs du Mal, nous voyons se dresser la silhouette d’un oiseau de mer, un de ces albatros

Qui suivent, indolents compagnons du voyage,
Le navire glissant sur les gouffres amers.

Le grand oiseau vogue, libre et fier dans l’espace. Capturé par les hommes d’équipage ce n’est plus qu’un objet de dérision et de jeux. De même le poète :

Exilé sur le sol au milieu des huées,
Ses ailes de géant l’empêchent de marcher.

Ainsi, dès ce premier poème, nous voilà renseignés sur « la manière » de l’artiste. D’autres nous auraient peint le grand oiseau, décrit peut-être sa silhouette, entraîné dans les méandres de son vol. Baudelaire, lui, se contente de