Page:Désorgues - Chant funèbre, en l’honneur des guerriers morts à la bataille de Marengo, 1799.djvu/22

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Déjà sur Vienne enorgueillie,
Bellone a vengé votre mort ;
Déjà, de la belle Italie
Par vous elle a fixé le sort.
Mais quel triomphe si sublime,
D’une ame grande et magnanime,
Pourrait acquitter la valeur ?
Et quelle dépouille opulente
D’une plaie à jamais sanglante,
Calmera la juste douleur ?

À peine, en sa course paisible,
S’élève l’astre du matin,
Que le sort, d’un bras inflexible,
Tend sur nous son arc souverain.
Au sein d’Amphitrite agitée,
Des vents et de l’oncle irritée,
Un écueil brave en peint l’effort.
Mais, dans les horreurs du carnage,
Que peut le plus ferme courage
Contre les flèches de la mort ?

La mort qui du lâche Thersite
Dédaigne les jours incertains,
D’Achille au courroux de Cocyte
immole les jeunes destins.
Il lui faut de grandes victimes ;
Sur les héros les plus sublimes
Sa faulx appesantit ses coups ;
Et dans ces luttes mémorables,
Par des pertes irréparables,
Se manifeste son courroux.