Page:D’Alembert - Œuvres complètes, éd. Belin, V.djvu/43

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

peint aussi, et un des bouffons italiens. Je serai là en gaie et triste compagnie.

J’ai déjà eu l’honneur de vous mander que vous pouviez garder mes lettres, et les faire lire à Formont, mais à lui seul. Très peu de personnes les ont vues, et vous seule en avez copie. C’est de tout ce que j’ai fait en ma vie, la seule chose que je désire qui subsiste quand je ne serai plus. Je vis, ces jours passés, à l’Opéra, M. de La Croix, qui me donna des nouvelles de votre santé, et avec qui je parlai beaucoup de vous. Il dit que vous vous couchez fort tard : ce n’est pas là le moyen de dîner quand vous serez à Paris. Au surplus, je crois que vous vous porterez bien, quelque genre de vie que vous suiviez, pourvu que vous vous observiez sur le manger ; car, comme dit Vernage, Il ne faut point trop manger. À propos, quel compliment faut-il vous faire sur la mort de madame la duchesse du Maine ? Voilà le moment d’imprimer les mémoires de madame de Staal. Adieu, madame ; soyez persuadée du tendre attachement que je vous ai voué pour toute ma vie.


À LA MÊME.


10 mars 1753.


Je viens d’apprendre, madame, dans le même moment, votre maladie et votre convalescence. M. de La Croix m’a dit que vous aviez eu un accès de fièvre très fort, qui vous avait fort agitée et fort inquiétée ; mais que cet accès n’avait point eu, heureusement, de suites fâcheuses. Ménagez, je vous en supplie, votre santé ; observez-vous surtout sur le manger : ce sera peut-être un peu de gourmandise qui vous aura procuré cet accès de fièvre. Je suis très convaincu que vous pourrez vous soutenir avec du soin et du régime ; mais je ne le suis pas moins que le soin et le régime vous sont absolument nécessaires. Vous devez cette attention à vos amis, quand vous n’y seriez pas vous-même la première intéressée. Profitez des beaux jours qui commencent à revenir. Faites un peu d’exercice, mais très modérément, le plus souvent en carrosse ; essayez même un peu de marcher, vous vous trouverez bien d’avoir ce courage. J’ai donné le même conseil à quelques personnes qui s’en sont très bien trouvées, et je suis persuadé que cela vous réussirait aussi. Pardonnez-moi de faire ici le Vernage, et de lui voler ses lieux communs ; l’intérêt que je prends à votre santé et à votre bonheur sera mon excuse.

Savez-vous bien que l’abbé de Canaye, à qui j’ai lu quelques-