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LE ROI

Mayenne, plus lent, perdit quelques jours à ordonner son armée. Suivi de trente mille hommes d’infanterie, de dix mille cavaliers wallons, italiens, allemands et de quelques Français ligueurs, il se mit à la poursuite du roi par Gournay, Neuchâtel et Eu, d’où il étudia les positions navarraises, plaça son avant-garde au village de Martin-l’Église, et apprit soudain de M. de Nemours que cinq mille piétons et sept cents cavaliers royaux défendaient Arques.

— Nos éclaireurs ont vu le roi de Navarre : il est en gilet de buffle, armé d’une scie, d’une pioche et d’un sac de clous, botté comme un pêcheur d’huitres, la barbe emmêlée de copeaux, courant sans cesse et hurlant aux travailleurs des drôleries ; son ouvrage défensif est une merveille, solide et expertement sciencée.

— C’est le diable que ce Gascon, murmura Mayenne.

Le soir du 20 septembre, le roi s’en fut au camp d’Arques, visita ses troupes, appelant par leurs noms la plupart des hommes, s’informant auprès des plus humbles des nouvelles de Marion, si leurs mères n’avaient pas la fièvre, et quel temps il faisait chez eux. Comme il quittait les gens de pique, un groupe étrange l’arrêta soudain.

En arrière d’une compagnie gasconne d’arquebusiers, sur le dos d’un cheval immobile un cercueil était attaché, calé sur des traverses de bois,