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LE ROI

vera, pour qu’il soit aimé quand il sera vainqueur ! (Une fièvre sacrée recula soudain les quatre hommes) Le roi maintenant s’efface ! clama le valet. Inutiles victoires ; il se sent désarmé dans son armée ! Pour vaincre, il lui faudrait un second Ivry, et qui fut gagné par les Mots, car la grande conquête ne sera que le jour où les peuples sauront comprendre ! Délivrer la France de l’Espagne, c’est bien ; mais la délivrer d’elle-même ! Le roi met bas son épée ; vite à vos plumes, messieurs ! Une satire vaut douze batailles. Le peuple n’aime pas le bruit du canon quand il dure, mais la bombarde des couplets se tire gaiement à toute heure et gagne enfin les esprits. Aux mots ! D’un petit gland croit grand chêne. Plus de combats, un livre ! La force crie à l’ironie : aidons-nous ! À l’aide, messieurs les bourgeois ! Bafouez ces princes qu’ensemble nous tenons pour sangsues du peuple ! Ahontez Mayenne à jamais ; et ce que les armes n’ont pu, que l’éclat de rire le fasse ! Ce jour-là, Paris sera sauvé. Le roi entrera en France pour y commencer le grand œuvre, y défricher, boiser, assainir. Le paysan prendra la terre, vous les idées, lui les balances et le glaive. Il dressera la table puisqu’il est laquais comme moi, et la poule qu’il veut mettre au pot sera grosse assez pour que s’esbaudissent au repas tous ceux qu’il convie ! Car je la veux la paix ! et je la veux l’aisance ! et je le ferai le bonheur ! (Les têtes épouvantées frémirent) J’abolirai la haine et le désordre et, valet, ce sera ma tâche de nettoyer la