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LUDWIG VAN BEETHOVEN

d’école. Le rôle d’un maître de composition n’est pas de corriger les fautes d’orthographe, il a bien autre chose à faire avec l’esprit de son élève !

En ce qui regarde toutes ces études d’assouplissement, pourrait-on dire, depuis le contrepoint simple jusqu’aux chinoiseries du double-chœur et de la double fugue, Albrechtsberger se chargea d’instruire le jeune Beethoven, mais l’enseignement que celui-ci tira des leçons et des fécondes conversations avec Haydn fut, pour le futur compositeur de la Messe en ré, autrement profitable et précieux. Le « papa Haydn » lui apprit à discerner, à disposer ses éléments musicaux de façon logique, à construire, en un mot, ce qui est tout l’art du compositeur ; aussi Beethoven, malgré ce qu’en peut dire F. Ries, toujours fort sujet à caution, garda-t-il à son maître une profonde reconnaissance ; mille détails sont là pour en témoigner. Il n’est pas jusqu’aux salutaires conseils que Haydn donna à son élève au sujet des trois premiers trios, qui n’aient été travestis et présentés comme des preuves de jalousie ou d’incompréhension. Flagrante injustice, en vérité, car Haydn eut grandement raison de conseiller à Beethoven un remaniement de ces premiers trios, beaucoup trop touffus et mal équilibrés dans leur version primitive, surtout le troisième en ut mineur, qui dut faire l’objet d’une refonte complète. L’auteur des trios sut bien reconnaître lui-même le service que lui avait rendu son maître en cette circonstance ; causant, beaucoup plus tard, avec le flûtiste Drouet : « Ces trios », disait-il, « n’ont pas été gravés sous la forme dans laquelle je les avais primitivement écrits. Quand je relus mes manuscrits, je me demandai si je n’étais pas fou de