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LUDWIG VAN BEETHOVEN

Enfin, pour abréger, le même sentiment poétique n’a-t-il pas dicté le dernier mouvement du VIe quatuor de Beethoven (1799) et le finale de la 8e  sonate du musicien de Dessau ? Cette Malinconia interrompue par l’exposition d’un joyeux rondeau, puis reparaissant au milieu des ébats champêtres, n’est-elle pas pour ainsi dire calquée, au moins dans sa forme, sur la mélancolie (Schwermuth) de Rust, que vient compléter et consoler une pensée joyeuse (Frohsinn) à l’allure toute pastorale et presque beethovénienne ?

En ce qui regarde Haydn, l’imitation est de forme plus encore que de fond. On dirait que l’élève, pas très sûr de pouvoir marcher tout seul, emprunte la canne à pomme d’or de son maître, sans aller toutefois jusqu’à chausser les beaux souliers à boucles du père de la symphonie.

Beaucoup de caractères particuliers à la façon de construire de Haydn se retrouvent dans les œuvres de la jeunesse beethovénienne. C’est aux sonates et aux quatuors de la dernière manière de Haydn que Beethoven a pris cette constitution du second thème en trois éléments, en trois phrases distinctes mais inséparables l’une de l’autre.

Cette disposition ne se rencontre d’ordinaire ni chez Mozart, ni chez Clementi, ni chez leurs contemporains ; en revanche on l’observe déjà, quoique sous une forme rudimentaire, dans les Sonates wurtembergeoises d’Emmanuel Bach, dont Haydn fut le véritable continuateur.

Comme celui-ci, le jeune Beethoven aime les épisodes « piquants », les courtes excursions vers les tonalités éloignées de la principale ; il n’est pas jusqu’aux