leçon. Justement, une situation magnifique lui est proposée : « 600 ducats en or, quelques concerts seulement à organiser, un orchestre à ma disposition et tous les loisirs pour composer de grandes œuvres. » L’eau lui en vient à la bouche.
Pourtant, c’est le nouveau roi de Westphalie, Jérôme Bonaparte, qui l’invite ainsi à venir à sa Cour.
Mme d’Erdödy a appris la nouvelle. En un clin d’œil, elle a réuni chez elle tous ses amis pour aviser aux moyens d’empêcher ce scandale : leur Beethoven réduit à s’expatrier ! Mais il s’agit, tout en arrangeant les choses, de ne pas alarmer la susceptibilité du grand homme et de lui laisser l’espérance d’obtenir un jour une situation officielle en Autriche, « son rêve le plus cher », en vue d’un établissement matrimonial…
D’un commun accord, les trois princes, Rodolphe, Kinsky et Lobkowitz ont signé l’acte du 1er mars 1809 qui assure à Beethoven une rente annuelle de quatre mille florins. Beethoven n’ira pas « goûter du jambon de Westphalie », il s’en félicite, à bon droit, dans une lettre à son ami Gleichenstein. Que fût-il, en effet, advenu de lui, antisémite déclaré, au milieu du ghetto doré qu’était alors la Cour de Cassel, dans ce décor où le scandale des mœurs le disputait au gaspillage financier ? La réponse nous est donnée par le baron de Trémont, ce visiteur français qui nous a laissé de l’intérieur du grand musicien une des plus vivantes descriptions qui soient[1] : « Il n’y serait pas resté six mois. » Moins d’un
- ↑ Voy. le récit du baron de Trémont dans le Guide musical de mars 1892. M. Michel Brenet avait mis au jour ce manuscrit de la Bibliothèque nationale dix ans avant la soi-disant découverte communiquée à la Revue : die Musik de 1902.