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LUDWIG VAN BEETHOVEN

ses opéras. Pourquoi s’étonnerait-on de cette expression militaire du patriotisme chez Beethoven dont toute la vie, sauf les dix dernières années, se passa en pleine guerre, au milieu des mouvements de troupes, des bombardements, des invasions ? Ne paraît-il pas naturel que sa conception de la patrie ait été inséparable de l’appareil guerrier dont il était entouré et que l’héroïsme un peu grandiloquent compris à la façon de Plutarque, son auteur favori, se soit concrétisé pour Beethoven en l’image de plumets gigantesques et de kurtkas à la hongroise, et exprimé musicalement par des rythmes de tambour et de galop ?

C’est sous cette forme que nous le rencontrons dans la Marcia funebre de l’op. 26, dans la Sonate pour violon à l’empereur Alexandre, op. 30, no 2, où la seconde idée prend l’allure d’une attaque de grenadiers Préobajenski, dans la IIIe Symphonie, dans le concerto pour violon (1806), dans l’andante guerrier et le finale, si parfaitement héroïque de la Ve symphonie (1808), dans l’ouverture et les entr’actes d’Egmont (1809), et, tout naturellement, dans la Victoire de Wellington et la douzaine de marches ou pièces pour musique militaire qu’il écrivit de 1809 à 1816. On en trouverait encore des échos ou des souvenirs dans l’op. 101 (1816) et jusque dans le XVe quatuor et la IXe symphonie.

C’est encore, en partie, le sentiment guerrier qui s’expose dans la superbe ouverture de Coriolan (1807), bien que le rythme militaire n’y paraisse pas ; mais ici, ce sentiment entre en lutte avec un admirable thème d’amour conjugal et finit par succomber, comme le héros du drame, sous les atteintes de la fatalité.

Une parenthèse s’impose à propos de la Symphonie