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Page:D’Indy - Beethoven, Laurens.djvu/90

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LUDWIG VAN BEETHOVEN

allons le voir se transformer dans la Fantaisie pour piano, orchestre et chœurs, dédiée, en 1808, au roi de Bavière. Ici, le thème du mutuel amour se présente et se développe, à peu de choses près, comme celui du finale de la IXe symphonie, dont il est incontestablement l’ancêtre. Exposé d’abord par le piano et les instruments solistes de l’orchestre, il ne reçoit, comme dans la symphonie de 1823, sa signification que par la voix des chanteurs, solistes aussi, que vient ensuite renforcer le chœur complet. Le texte nous dépeint, non plus l’attachement de deux amants, mais celui qui relie les âmes nobles les unes aux autres, et, chose curieuse, la même modulation, ou plutôt, le même point de suspension sur l’accord de mi bémol majeur qui, dans la neuvième symphonie, désigne la demeure de l’Être divin, « au-dessus des étoiles », se retrouve, à la même place, et dans le même ton, vers la fin de la Fantaisie, pour symboliser « l’union d’Amour et de Puissance » qui est réalisée en Dieu seul.

Pour conclure, la caractéristique du style de cette deuxième époque, dont nous venons de passer en revue les principales manifestations, peut se résumer en quelques mots : trouble causé par la première atteinte des passions, se traduisant par une période presque désordonnée musicalement, de 1801 à 1804. En 1804, la crise aiguë est passée, l’équilibre se rétablit en trois chefs-d’œuvre : la sonate op. 57 (l’amour), l’op. 53 (la nature), la IIIe symphonie (l’héroïsme). Enfin cette âme, blessée ou consolée, a besoin de crier à tous sa souffrance ou de célébrer devant tous l’accueillante nature ; alors, pour la première fois, c’est à l’orchestre, à cet instrument