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L’ARTISTE ET L’ŒUVRE MUSICAL

produit chaque année le respect de vaines traditions. La musique de Franck se manifeste, il est vrai, de préférence, d’après l’ordonnance régulière des coupes consacrées par le génie des maîtres, mais ce n’est point de la reproduction des formes de la sonate ou de la symphonie qu’elle tire sa beauté. Ces grandes constructions sonores où se complaît une pensée qui, pour s’exprimer toute, a besoin des amples périodes, du vaste espace qu’elles lui accordent, s’édifient d’elles-mêmes, ainsi qu’il sied, sous l’impulsion nécessaire de son développement. Et c’est parce que, chez Franck, cette pensée est classique, c’est-à-dire aussi générale que possible, qu’elle revêt naturellement la forme classique, et non pas en vertu d’une théorie préconçue ni d’un dogmatisme réactionnaire qui subordonnerait la pensée à la forme.

« Les productions de cette espèce, semblables à des organismes dans lesquels la fonction crée l’organe, sont aussi différentes des schématismes de la plupart des néo-classiques qu’un corps vivant d’une cire anatomique. Elles se soutiennent aussi fortement par leur principe caché que les ouvrages dans lesquels la forme n’est pas engendrée par la pensée se soutiennent peu. Elles prospèrent où ils lan-