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Page:D. - Mémoires d’une danseuse russe, 1893.djvu/183

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le feu à la peau, au milieu des éclats de rire des ouvrières enchantées de voir fouetter sévèrement des fesses neuves, qu’elles voyaient pour la première fois à découvert. Je n’avais rien dit, mais je pleurais comme une Madeleine, quand elle me recouvrit les fesses. Je dus me remettre à pousser l’aiguille avec le feu au derrière.

Étant la dernière venue, on me chargeait de toutes les menues besognes, de toutes les courses dans les environs, et j’étais le souffre-douleur de l’atelier. J’avais beau m’escrimer à faire de mon mieux, je n’avais jamais assez bien fait. Si j’allais faire une commission, je ne revenais jamais assez tôt. Si quelque ouvrière égarait un objet, c’était moi qui l’avais perdu.

Quand je rentrais d’une course, eussé-je volé pour revenir plus vite, on me troussait et on me fessait, sous prétexte de retard. On ne retrouvait pas l’objet égaré, on me troussait et on me fessait. On le retrouvait dans quelque coin, je l’y avais caché, on me troussait et on me fessait. Enfin j’avais beau faire, j’étais toujours troussée et toujours fessée, et malgré le feu qui me cuisait