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Page:D. - Mémoires d’une danseuse russe, 1893.djvu/89

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On entendait fort bien. La lectrice éleva la voix pour obéir aux ordres de sa maîtresse.

— Là, maintenant tu m’écorches les oreilles avec tes cris. Tiens, sotte bête !

La pantoufle cingla la joue si fort qu’elle enfla aussitôt, et la lectrice se mit à sangloter.

— Bon, te voilà devenue muette, maintenant. Allons, reprends ta lecture. Ah ! tu ne veux plus lire ! Eh ! bien, tiens, attrape !

Et la pantoufle cingla et recingla la gorge rebondie, qui sautait sous les rudes soufflets que lui appliquait la cruelle maîtresse, s’acharnant à vouloir qu’elle lise. Elle voyait bien que c’était impossible, car la pauvre fille sanglotait, en versait toutes les larmes de son corps.

— Ah ! tu t’obstines à ne pas vouloir lire ! Eh ! bien je te promets que tu vas chanter alors. Mettez-la en tenue vous deux.

Deux vigoureuses filles de chambre conduisirent Véra au milieu de l’appartement, elles la firent incliner et chacune d’elles prit un pan du peplum dans sa main.