Page:D - La Comtesse de Lesbos, 1889.djvu/9

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dit-elle, c’est passé, je regagnerai bien le bord toute seule. » Elle se retourne en effet, et se remet à nager vers la plage ; mais la douleur avait ankylosé sa jambe gauche, et elle fut obligée d’accepter ma main droite, ce qui nous permit de nager de compagnie, chacun d’un bras, sans trop de peine, en unissant nos mouvements. Au bout d’un instant la crampe la reprit ; je dus la prendre sur mon dos ; elle s’étendit tout le long de mes reins, la gorge appuyée sur mes épaules, les bras m’entourant le cou ; et, libre de tous mes mouvements, je me mis à nager vigoureusement, délicieusement remué par le doux contact. De la plage, on cherchait à deviner ce qui se passait, et quand j’y déposai mon précieux fardeau, chacun s’enquérait de l’accident ; la soubrette, émue et tremblante, les yeux baignés de larmes, avait sauté au cou de sa maîtresse, sans s’inquiéter de la surprise que causait la familiarité de ces épanchements. Mais déjà elle l’entraînait vers la cabine. La comtesse m’avait remercié d’un sourire, sans un mot.

Ce sourire m’autorise-t-il, me disais je le soir, à aller prendre de ses nouvelles ? Après