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pondance. On lui écrivait de partout, du fond de la France ou de l’étranger. « Vous ne vous plaindrez pas de manquer de nouvelles, » lui disait-elle.

Il répondait par un grognement, ramassait ses lettres, ses imprimés, et montait dans sa chambre.

« Quel ours ! » pensait Louise. Bénitaud piquait sa curiosité. Un drôle de personnage, sans profession définie. Il portait une cravate Lavallière, un costume de velours sombre, une paire de bottes comme un chasseur, un feutre à larges bords qui lui cachait le visage. Il s’absentait chaque semaine, un jour, deux jours, puis rentrait, soucieux, sans dire un mot de son absence. Il ne faisait jamais rien comme tout le monde !

Un matin, dans le courrier de Bénitaud, Louise vit une lettre dont l’enveloppe était aux trois quarts décollée. Elle la tourna entre ses doigts, essaya de lire par transparence. Après un instant d’hésitation, elle alla se réfugier dans sa cuisine, décacheta la lettre et lut : « Rendez-vous chez moi, samedi soir — Carlo. »

« Il faut bien savoir à qui on a à faire, » grommela-t-elle, en manière d’excuse. Elle