Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 1.djvu/167

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et enfin un culte officiel au Sia-tsik ou génie protecteur du royaume. Quelquefois aussi, dans les actes publics du gouvernement, il est fait mention des bons génies et du destin.

Les missionnaires ont souvent interrogé des Coréens très-instruits sur le sens qu’ils attachent au mot Siang-tiei, sans jamais obtenir de réponse claire et précise. Les uns croient que l’on désigne par là l’Être suprême, créateur et conservateur du monde ; d’autres prétendent que c’est purement et simplement le ciel, auquel ils reconnaissent un pouvoir providentiel, pour produire, conserver et faire mûrir les moissons, pour éloigner les maladies, etc… ; le plus grand nombre avouent qu’ils l’ignorent et qu’ils ne s’en inquiètent guère. Quand on offre des sacrifices publics pour obtenir la pluie ou la sérénité, ou pour conjurer divers fléaux, la prière s’adresse soit à l’Être suprême, soit au ciel, selon le texte que rédige le mandarin chargé de la cérémonie.

Voici quelques détails sur ces sacrifices, assez peu fréquents d’ailleurs. Quand des districts ou des provinces souffrent de la sécheresse, le gouvernement envoie un ordre aux mandarins, et chacun d’eux, au jour marqué, se rend dès le matin avec sa suite, ses prétoriens et ses satellites au lieu qui lui est désigné. Là, il attend patiemment sans prendre aucune nourriture, sans même fumer de tabac, que l’heure propice arrive. C’est ordinairement vers minuit, et en tout cas, le mandarin ne doit rentrer chez lui qu’après minuit passé. Au moment précis, il immole des porcs, des moutons, des chèvres, dont le sang et les chairs crues sont offerts à la divinité. Le lendemain il se repose, pour recommencer le surlendemain, et ainsi de suite, de deux en deux jours, jusqu’à l’obtention de la pluie. À la capitale, les mandarins se relèvent, afin que les sacrifices aient lieu tous les jours. Si après deux ou trois sacrifices on n’obtient rien, on change de place, et l’on s’installe dans un autre endroit plus propice. Les diverses stations que l’on doit ainsi occuper sont déterminées par d’anciens usages. Si les prières sont inutiles, les ministres viennent officier à la place des mandarins ; et enfin, quand ni les mandarins ni les ministres n’ont pu rien obtenir, le roi lui-même vient en grand appareil pour sacrifier et obtenir le salut de son peuple. Lorsque la pluie arrive, ni le sacrificateur ni les gens de sa suite n’ont le droit de se mettre à l’abri ; ils doivent attendre jusqu’après minuit avant de rentrer dans leurs maisons. Tout le peuple les imite, car on croirait faire injure au ciel en cherchant à éviter une pluie si ardemment désirée, et si quelque individu a la