Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 1.djvu/217

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Par Pien-men les difficultés ne sont guère moindres. Chacun des Coréens qui suit l’ambassade, à quelque titre que ce soit, est visité à la porte, lors du départ pour la Chine, et fouillé de haut en bas. Si sa personne et ses bagages n’offrent rien de suspect, il reçoit un passeport où tout est minutieusement détaillé. Supposons que les courriers ont obtenu leurs passeports. Ils ramènent avec eux un missionnaire, et ont réussi à passer la douane chinoise ; mais de là à la douane coréenne, il y a quinze lieues de désert. À droite et à gauche de l’unique route, s’étendent des forêts impénétrables. Si pendant le trajet on s’avise de faire du feu pour préparer quelque nourriture, les autres voyageurs accourent afin de faire eux-mêmes cuire leur riz, ce qu’on ne peut leur refuser, et le danger pour le missionnaire est grand, vu la curiosité insolente des Coréens. On arrive sur les bords du fleuve où stationnent des gardiens, et l’on descend dans une barque coréenne qui conduit les voyageurs à la douane située sur l’autre rive. Là, chacun doit présenter son passeport, se laisser fouiller et examiner minutieusement. Le missionnaire évidemment ne peut affronter cette douane, aussi a-t-il pris soin de demeurer caché sur l’autre rive. Il doit attendre la nuit pour tenter le passage sur la glace, car c’est toujours en hiver que l’ambassade revient de Péking. Mais sur la rive coréenne sont échelonnés de distance en distance des corps de garde, chacun avec un piquet de soldats et une troupe de chiens. La seule chance de succès est de se traîner dans les ténèbres entre deux corps de garde, et d’escalader les montagnes neigeuses du voisinage pour, de là, regagner la route à l’intérieur. Les premiers missionnaires entrèrent par cette voie ; mais bientôt, à la suite des persécutions, toutes les ruses des chrétiens furent connues, non-seulement des mandarins, mais des douaniers, des aubergistes, de tous les habitants païens, et l’on fut forcé d’abandonner cette route, désormais impossible.

Reste la voie de mer. Nous avons fait connaître les conventions maritimes en vigueur entre la Chine et la Corée, d’où il résulte qu’aucun navire de l’un des deux pays ne peut, légalement, aborder à la côte de l’autre. Cette prohibition n’est violée ni par les Coréens, ni par les Chinois. Les milliers de jonques chinoises qui parlent chaque année du Léao-tong, du Kiang-nan, du Chan-tong, et vont à la pêche sur les côtes de Corée, stationnent toujours loin du rivage. Si elles approchent de trop près, elles sont soumises aux perquisitions les plus sévères, et aucune considération, aucune offre d’argent ne déciderait leur équipage