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et le redoublement de surveillance, surtout aux frontières, ne lui avaient pas permis de le faire l’année précédente. Thomas Hoang Sim-i, né à Siong-meri, au district de Tek-san, et l’un de ceux qui avaient attendu le prêtre sur la frontière en 1795, fut choisi pour courrier. Il dut acheter à prix d’argent une place de domestique auprès d’un des membres de l’ambassade. Ayant caché soigneusement dans ses habits les deux morceaux de soie sur lesquels étaient écrites la lettre latine du P. Tsiou, et la lettre des chrétiens en caractères chinois, il se mit en route, et, le 28 janvier 1797, arriva à Péking. L’évêque Govea passa de l’extrême inquiétude à la joie la plus vive, en lisant les lettres du missionnaire et des chrétiens. Dans sa lettre, le prêtre parlait des moyens de procurer la paix à l’Église coréenne. Le meilleur à ses yeux eût été de demander à la cour de Portugal, un ambassadeur qui viendrait saluer le roi de Corée, et faire alliance avec lui. Avec cet ambassadeur, on eût envoyé des prêtres savants dans les mathématiques et dans la médecine, qui auraient pu s’établir dans le pays, et que le gouvernement coréen eût traité favorablement, par égard pour le roi de Portugal. Nous ignorons si la demande de cette ambassade fut faite. Ce qui est certain, c’est que jamais personne ne fut envoyé.

Aussitôt que le P. Tsiou connut suffisamment la langue coréenne et les usages du pays, il s’occupa de l’administration des chrétiens, mais avec les plus grandes précautions. Lorsqu’il sortait. Colombe seule savait où il allait. On cachait soigneusement toutes ses démarches ; il n’avait de rapport qu’avec les chrétiens les plus sûrs, et le plus grand nombre, surtout dans les provinces, soupçonnaient à peine qu’il y eût un prêtre en Corée. Il ne se montrait même pas à tous les membres des familles qui le recevaient, et plusieurs fois des serviteurs même chrétiens purent seulement deviner sa présence, qui n’était publiquement avouée de personne. L’extrait suivant d’une lettre écrite par un chrétien de l’époque, va nous donner une idée de la rigueur avec laquelle le secret était gardé.

L’auteur de cette lettre est Pierre Sin Tai-po, martyrisé en 1839. Il l’écrivit dans sa prison en 1838, sur un ordre de M. Chastan, qui recueillait avec soin tous les souvenirs des vieillards concernant les premiers temps du christianisme en Corée. Jean Ni Ie-tsin-i, dont il est ici question, est le même que nous verrons plus tard renouer les communications avec Péking.

« Mon parent Jean Ni Ie-tsin-i et moi, étions chrétiens depuis