Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 1.djvu/313

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Cependant les païens disaient : « C’est à cause de lui que la sécheresse nous désole, et que nous mourons de faim ; il faut l’achever à coups de pied. « La foule se pressait autour de lui. Sa femme voulut s’approcher pour le soulager ; les clameurs s’élevèrent contre elle, et repoussée, maltraitée, battue, foulée aux pieds, elle fut emportée évanouie. Paul ayant repris connaissance, le mandarin le lit frapper pour la troisième fois. Ses jambes avaient été cassées au-dessous du genou ; on voyait à nu les os brisés, et la moelle coulait jusqu’à terre. Lorsqu’on le délia, il resta étendu sans mouvement. Sans lui ôter sa cangue, on le jeta sur une natte, et quatre satellites le rapportèrent à la prison, qui fut fermée avec soin. Le mandarin dit : « Si quelqu’un lui donne seulement un verre d’eau, je le fais mourir comme lui. » Pendant deux jours, le martyr ne reçut aucun soulagement, et personne ne put savoir s’il était mort ou vivant. Le 12, vers le soir, le mandarin dit à ses gens : « Allez à la prison, tirez ce chrétien dehors, voyez son visage, tâtez-lui le pouls, et s’il vit encore, achevez-le, et venez m’en rendre compte. Les satellites exécutèrent cet ordre, et, à coups de pierres et de bâtons le mirent dans un tel état que, sauf la paume des mains, aucune partie du corps n’était sans blessure ; toutefois, il lui restait encore un souffle de vie. Les bourreaux le dirent au mandarin, qui leur répondit en colère : « Si vous ne l’achevez pas, je vous fais tous assommer. » Ils retournèrent donc à la prison, et, cette fois, ne mirent de bornes à leur fureur que lorsque l’âme du martyr se fut envolée au ciel. Cependant le mandarin, craignant qu’il ne revînt encore à la vie, fit continuer le supplice sur le cadavre. Un des satellites lui appuya le bout de la cangue sur la poitrine, et monta dessus ; les côtes se brisèrent et le sang coula à flots. Le corps n’avait plus forme humaine. On le couvrit d’une natte, et on le garda pendant la nuit. Le lendemain, il fut enterré par ordre du mandarin ; mais sept ou huit jours après, des chrétiens éloignés d’environ dix lieues, vinrent le prendre pour l’ensevelir honorablement chez eux. Paul était âgé de 56 ans. Son martyre arriva l’an de Jésus-Christ 1798, le 12 de la sixième lune. Pour consoler sa veuve, le geôlier lui dit : « Ne vous affligez pas trop, car le 12, pendant la nuit, j’ai vu une grande lumière environner le corps de votre mari. »


Vers le même temps, mais dans une autre province, Laurent Pak donnait aux fidèles l’exemple du même courage et de la même persévérance. Nous l’avons vu, pendant la persécution de 1791, intervenir hardiment en faveur des chrétiens, et souffrir la flagel-