Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 1.djvu/375

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

À la capitale, il n’était personne qui ne déplorât et ne regrettât sa mort. D’après la loi et les coutumes, ses proches parents auraient dû perdre leurs places, et le nombre de ceux qui se trouvaient ainsi compromis était très-considérable, même parmi les plus hauts dignitaires du royaume. Mais la famille du défunt, à peu près toute-puissante, parvint à faire admettre pour cette fois ce principe, que les actes étant personnels, les parents n’ont pas à en répondre, et, par là, tous les parents de Josaphat purent conserver leurs dignités. Afin de faire disparaître, autant que possible, la tache d’infamie dont cette mort souillait la branche principale de la famille des Kim, on adressa une pétition au gouvernement, pour faire casser l’adoption de Josaphat. La régente y consentit, et un autre fut substitué officiellement au martyr, comme descendant de la branche aînée.

Le même jour, et au même lieu, plusieurs parents de Josaphat Kim partagèrent son triomphe. Le plus connu d’entre eux est Kim Paik-sioun-i qui, n’étant encore que catéchumène, n’a pas, dans les actes, de nom de baptême. Cousin de Josaphat, nous ne savons à quel degré, il vivait à la capitale, dans une grande pauvreté, et ne songeait qu’à en sortir, et à se frayer une voie aux honneurs et fonctions publiques. Un de ses ancêtres, qui était ministre en 1636, quand les Mandchoux arrivèrent près du fleuve qui sépare la Corée de la Chine, avait refusé de se soumettre aux Barbares, et s’était brûlé lui-même. Cet acte de dévouement à son pays et à son roi fit qu’on lui érigea, et qu’on permit aussi à ses descendants de lui ériger une porte monumentale, deux honneurs qui deviennent pour la postérité de celui à qui on les accorde, des titres à un avancement rapide.

Paik-sioun-i donc, uniquement dans des vues d’ambition, s’appliqua aux études ordinaires des lettrés. Mais Dieu, qui avait sur lui des desseins de miséricorde, lui inspira peu à peu le désir de la véritable gloire et du véritable bonheur. Pour y parvenir, il se mit à lire les écrits philosophiques des grands hommes, mais leurs obscurités, leurs contradictions firent naître des doutes dans son esprit, et il ne les considéra plus comme entièrement dignes de foi. Ayant vu dans les écrits de Lao-tse et autres, que l’homme en mourant n’est pas anéanti, il se créa de nouvelles doctrines et un nouveau système, qu’il ne tarda pas à expliquer à quelques amis. « Tes paroles sont bien étonnantes, lui répondirent-ils, sans doute tu as tiré tout cela de la religion européenne.» Cette observation frappa beaucoup Paik-sioun-i, et il se dit en lui-même : « En voyant des choses qui surpassent notre intelli-