Aller au contenu

Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 1.djvu/385

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la pleurer, jusqu’à ce qu’après une longue absence, Agathe revint auprès d’elle. Ni les prières, ni les murmures de sa famille, qui ne comprenait rien à son héroïque détermination, ne purent toucher son cœur. Elle n’en devenait au contraire que plus ferme dans son dessein d’être toute à Dieu, et plus zélée pour procurer à ceux qui l’entouraient les bienfaits de la foi.

En 1795, elle vint avec sa mère demeurer à la capitale. Elle n’était pas encore baptisée, lorsque son cousin Paul fut saisi, jugé et mis à mort, comme introducteur du prêtre étranger. Elle-même, obligée de se cacher, eut alors beaucoup à souffrir. Après la mort de sa mère, elle se retira près de Colombe Kang, et jalouse de l’aider autant qu’il était en elle, dans l’exercice des bonnes œuvres, elle se dévoua à l’instruction des petites filles que Colombe réunissait dans sa maison. Infatigable pour le salut des autres, Agathe travaillait avec plus de ferveur encore à sa propre sanctification. À une vie très-austère, à des jeûnes fréquents, à de rigoureuses mortifications, elle unissait des prières et des méditations continuelles ; aussi, ses progrès dans les voies de la perfection furent-ils rapides. Dieu daigna même récompenser les nobles efforts de sa servante par plusieurs grâces extraordinaires. Sa mère était morte sans avoir pu participer aux sacrements, et Agathe s’en affligeait beaucoup. Un jour elle la vit en la compagnie de la sainte Vierge. Craignant d’être victime d’un rêve ou d’une illusion du démon, elle découvrit cette apparition au missionnaire, qui l’interpréta favorablement, et rendit le repos à son âme. Une autre fois, elle eut une vision de la sainte Vierge. Le Saint-Esprit lui paraissait descendre sur cette reine du ciel, et reposer sur son cœur. Dans son humilité profonde, Agathe n’osait croire à la réalité de ces divines faveurs, et elle les eût repoussées, si le prêtre n’eût calmé ses craintes, en lui montrant une image exactement conforme à ce qu’elle avait vu. Elle avait une dévotion toute spéciale à sa patronne, et tâchait d’inspirer cette même dévotion aux personnes qui l’entouraient. « Que je serais heureuse ! disait-elle souvent, si je pouvais être martyre, comme sainte Agathe ! » Ses vœux furent exaucés.

Dès les premiers jours de la grande persécution, vers la fin de la deuxième lune, elle fut arrêtée avec Colombe, et pendant trois mois, partagea sa prison et ses souffrances, subit les mêmes interrogatoires, et eut à supporter les mêmes tortures. Cependant ces deux grandes âmes, qui s’étaient si bien comprises et si tendrement attachées l’une à l’autre, n’eurent pas la consolation d’aller ensemble au martyre. Leur sentence fut portée le