Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 1.djvu/559

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Paul entretenait toujours dans son cœur le désir du martyre et aimait à prendre pour sujet de méditation l’agonie de Notre-Seigneur au jardin des Olives. Il engageait les autres à en faire autant, afin d’être toujours prêts à souffrir la mort pour Dieu. « Il faut que notre sang soit versé, disait-il, pour que la religion se répande dans tout notre pays. » Quand la persécution s’éleva dans la province de Tsien-la en 1827, il fut dénoncé, dans un interrogatoire, au tribunal de Tsien-tsiou, pour les livres et images qu’il avait répandus de toutes parts. Les satellites de cette ville furent donc envoyés à la capitale pour se saisir de sa personne. Devant les juges, Paul suivit fidèlement les glorieuses traces de son frère et de sa sœur ; comme eux, il confessa courageusement sa foi, et laissa aux chrétiens de la Corée, et du monde entier, des exemples dignes de toute notre admiration. Voici comment il raconte lui-même les péripéties de son procès, dans une lettre écrite de sa prison, et dont l’exactitude est garantie par tous les témoins oculaires encore vivants.

« Souvent je m’étais dit : « Par le martyre du moins, pourrai-je bien espérer de satisfaire pour tous mes péchés ? » Au moment où je ne m’y attendais pas, le 21 de la quatrième lune, au commencement de la nuit, Kim Seng-tsip-i et une dizaine de satellites, tant de la province que de la capitale, se présentèrent à moi, me saisirent et me déposèrent à une des préfectures de police. Ils me demandèrent s’il était vrai que j’eusse dessiné des tableaux religieux ; à cette question, je compris que tout était découvert. « Cela est vrai, » leur dis-je. Le jour suivant, le grand juge criminel m’appela et me dit : « Est-il vrai que tu suives la religion du Maître du ciel ? — Oui. — Par qui as-tu été instruit ? — Mon frère aîné étant mort pour cette religion, dès l’enfance j’en avais entendu un peu parler ; mais, par la suite, je me suis lié avec Tsio-siouk-i tué, lui aussi, pour la même doctrine ; je m’y suis exercé plusieurs années avec lui et m’en suis rempli le cœur. — Maintenant encore si tu veux te désister, je te ferai conserver la vie. — Je ne le puis. — Ce que tu as déclaré, hier, est-il vrai ? — Oui, cela est vrai. » Et il me fit reconduire à la prison. Trois jours après, le grand juge, après avoir pris avis du premier ministre, me livra aux satellites, et à la chute du jour nous traversions le fleuve. Depuis mon arrestation, tracassé que j’étais par mille soucis, je n’avais pu rien manger et j’étais épuisé. La nuit se passa non loin de là, et le lendemain, de bonne heure, je partais accompagné de Seng-tsip-i et de six satellites.

« La nature n’étant pas entièrement morte en moi, des larmes