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faim et de la soif. Là, elle tomba malade de la peste, et ses forces étant épuisées par l’âge et les souffrances, elle mourut dans la confession de sa foi, en prononçant les saints noms de Jésus et de Marie. Elle avait alors soixante-dix-neuf ans. »

Le conseil de régence, en confirmant la sentence des neuf martyrs, avait, dans la même séance, décidé l’exécution immédiate des condamnés qui, dans les prisons de Tai-kou et de Tsien-tsiou, attendaient depuis treize ans la mort ; l’ordre en fut expédié sur-le-champ. Quittons un instant la capitale pour assister à leur glorieux triomphe.

À Tai-kou, chef-lieu de la province de Kieng-siang, il n’y avait plus que trois confesseurs ; le quatrième, Richard An Koun-sim-i, était mort de la dysenterie en 1835, la neuvième année de son emprisonnement. Le jour même où le décret royal arrivait à Tai-kou, André Pak, par une espèce d’inspiration, dit à ses deux compagnons de captivité : « L’heure de notre mort est proche, préparons-nous plus que jamais. » La nouvelle leur fut bientôt notifiée officiellement, et tous trois, heureux de recueillir enfin le fruit de tant d’années de souffrances, distribuèrent aux pauvres prisonniers leurs habits et les différents objets à leur usage. Les prisonniers étaient émus jusqu’aux larmes ; les geôliers eux-mêmes se montraient vivement affligés. Chacun voulait leur donner un peu de vin ou quelque autre rafraîchissement en signe d’adieu, et quand ils sortirent pour aller au supplice, on entendit des gémissements de toutes parts. Il semblait que chacun perdait un parent ou un ami. C’était le fruit des beaux exemples qu’ils avaient donnés pendant treize ans. Eux seuls étaient calmes et joyeux et, en marchant, s’encourageaient au martyre. On leur trancha la tête le 14 de la quatrième lune, 26 mai 1839. André Pak avait quarante-huit ans, André Ni soixante-quatre ans et André Kim quarante-six ans. Chose inouïe, les satellites recueillirent eux-mêmes leurs corps et les firent ensevelir et enterrer convenablement, tant nos confesseurs avaient su se concilier l’estime et l’affection de tous ceux qui les approchaient. Ces trois André, si longtemps fidèles à suivre les traces de leur saint patron, sont restés en grande et particulière vénération parmi les chrétiens du pays.

À Tsien-tsiou, chef-lieu de la province de Tsien-la, cinq autres confesseurs attendaient la bonne nouvelle de la véritable délivrance. Aussitôt qu’ils l’eurent reçue, ils laissèrent éclater leur joie, et répandirent leur âme devant Dieu en ferventes actions de grâces. Pierre Sim, seul, sentait dans son cœur un mouvement